Crédit: Fulbert ADJIMEHOSSOU

Dssraj au Bénin : Cruciale avancée vers les derniers kilomètres

Au Bénin, malgré les progrès réalisés dans la promotion et la jouissance des Droits à la Santé Sexuelle et Reproductive des Adolescents et Jeunes (Dssraj), le pays est confronté à des défis. L’un d’entre eux consiste à atteindre le dernier jeune ou adolescent, même dans les zones les plus reculées, et à lui garantir l’accessibilité aux services de santé sexuelle et reproductive.

il y a lieu d’améliorer l’accès à des services de qualité en santé sexuelle et reproductive pour les adolescent·e·s et les jeunes de 10 à 24 ans. Crédit Photo : Fulbert ADJIMEHOSSOU

Tori-Bossito est un symbole de changement. Cette commune située à 40 km au nord de Cotonou a été au centre d’une série d’activités en faveur des Droits à la Santé Sexuelle et Reproductive des Adolescents et Jeunes (Dssraj) durant le premier semestre de l’année. Grâce au projet « Nos Droits, Notre Vie », de nombreux jeunes sont devenus des vecteurs de changement au sein de leur communauté sur les questions de santé sexuelle et reproductive.

« Aujourd’hui, nous avons le courage de nous exprimer devant les autorités pour faire connaître nos besoins. Je les invite surtout à nous fournir les outils appropriés, à encourager le sujet dialogue parents et enfants sur le sujet de sexualité », plaide Gladys Gbèdo, bénéficiaire de ce projet mis en œuvre par le consortium

A l’entrée de la mairie, une œuvre d’art attire l’attention depuis la fin du mois de juin 2023. Peint sur un conteneur, elle représente un adolescent et une adolescente qui semblent fixer les passants avec détermination, soulignant ainsi leur volonté de faire entendre leur voix pour la protection de leurs droits. Le maire de Tori-Bossito Rogatien Akouakou a compris ce message au point de prendre des engagements.

Le maire de Tori Bossito au Bénin, Rogatien Akouakou signe ici la déclaration d’engagement en faveur de la jouissance des DSSRAJ

Les jeunes, à travers Filles et Actions, les officines pharmaceutiques et les radios communautaires, pourront faire partie du cadre de concertation communal pour la question de la santé sexuelle et reproductive des adolescents et des jeunes. « Ces nouveaux acteurs de divers horizons s’intégreront donc dans le cadre existant pour porter la voix des jeunes et participer activement à la formulation et à l’évaluation des politiques et programmes liés à la santé des jeunes« , assure Rogatien Akouakou.

« Les changements sont considérables »

Ces dernières années, le Bénin a réalisé des progrès significatifs dans la promotion des Droits à la Santé Sexuelle et Reproductive. La loi 2021-12 du 20 décembre 2021 a modifié et complété celle du 03 mars 2003 relative à la santé sexuelle et à la reproduction. L’éducation à la santé sexuelle et reproductive des jeunes s’est renforcée selon certains acteurs. « Les changements sont considérables« , insiste Edwige Binazon, Consultante en Dssraj et Coordonnatrice Atlantique-Littoral de la Fondation des Jeunes Amazones pour le Développement (FAJD).

Selon elle, de plus en plus de jeunes sont capables de prendre des décisions éclairées concernant leur santé sexuelle, faisant des choix responsables en matière de vie sexuelle. « Beaucoup d’entre eux deviennent des pères éducateurs pour transmettre l’information. Cela se traduit par une diminution des cas de grossesses non désirées et des infections sexuellement transmissibles« , ajoute-t-elle.

Dans cette « marche collective » des organisations et de l’État, de nombreuses activités sont menées en direction des adolescents, des jeunes, des femmes en âge de procréer, des élus locaux, des leaders religieux, des autorités traditionnelles et des associations de jeunesse.

Parmi ces activités, on note le plaidoyer participatif pour l’application des textes de lois en matière de santé sexuelle et reproductive, le renforcement des capacités des acteurs chargés de mettre en œuvre ces lois, et la communication en faveur d’un changement de comportement individuel et collectif, ainsi que la mise à disposition de services en Santé sexuelle et reproductive.

Dssraj: Des besoins pressants

Les pays membres du Partenariat de Ouagadougou se sont fixés pour objectif, à travers la stratégie post-2020, d’atteindre 13 millions d’utilisatrices de méthodes modernes de planification d’ici 2030. En 2022, les indicateurs affichaient déjà un chiffre de 7,1 millions. Mais il faut, entre autre, que la jouissance des Dssraj soit effective pour que les ambitions soient réalisés.

Sachant que le profil démographique des pays membres indique une prédominance des jeunes, avec près de 20% de la population générale âgée entre 15 et 24 ans, il est impératif de ne laisser aucun jeune de côté. Et ce, surtout dans les zones rurales ou difficiles d’accès, les crises climatiques, économiques et sécuritaires peuvent s’ajouter aux facteurs limitant les interventions.

« Les jeunes considèrent les questions liées à la santé sexuelle comme des besoins susceptibles de les aider à mieux gérer leur vie sexuelle. Malheureusement, il y en a encore qui considèrent cela comme un sujet tabou et rencontrent des difficultés à en parler », confie Odile Sacla, Assistante sociale à Agonlin, dans le département du Zou, à plus de 150 km de Cotonou.

Du milieu urbain à la campagne, voire au sein d’un même territoire, on constate des écarts en termes de sensibilisation et de prise de conscience concernant la jouissance des Dssraj. « Il est évident que les jeunes en milieu urbain sont mieux informés et mieux préparés que ceux en milieu rural« , déplore Odile Sacla.

TORIZ

 Edwige Binazon estime, quant à elle, qu’il ne faut laisser personne de côté. « Beaucoup de jeunes et d’adolescents en milieu rural sont négligés. Il y a également un problème de suivi pour ceux qui en bénéficient. Il faut veiller à ce que tout le monde soit touché de la même manière. Nous tentons d’intégrer le numérique, mais le défi est toujours là car tous les jeunes n’ont pas accès à internet », souligne la consultante.

Rendre les produits de santé sexuelle disponibles et accessibles

Un autre besoin crucial réside dans la disponibilité et l’accessibilité des produits de santé sexuelle nécessaires pour les personnes les plus défavorisées sur le plan géographique et financier. Cela ne peut être possible sans une chaîne d’approvisionnement performante.

« Une chose est de sensibiliser les jeunes, mais l’autre est de pouvoir les accompagner avec les services nécessaires. Imaginons qu’un jeune ait une inquiétude, à qui peut-il s’adresser ? Quelles offres de services lui sont garanties et avec quels moyens peut-il se procurer le service? Il est essentiel de rendre les produits plus accessibles et équitables », insiste Edwige Binazon.

Le programme RESPECT travaille à rendre accessible les méthodes contraceptives modernes chez les jeunes de 15 à 24 ans. Crédit Photo : Médécins du Monde Suisse

Des organisations, dont Médecins du Monde, l’ont compris en agissant pour améliorer la qualité de l’offre des services en santé sexuelle et reproductive des adolescents et des jeunes. L’organisation a mis à disposition de plusieurs zones sanitaires du Bénin, dont Abomey, Djidja et Agbangnizoun dans le département du Zou, puis Parakou et N’Dali dans le Nord, des consommables.

Ces actions s’inscrivent dans le cadre du Programme Respect qui vise à améliorer l’accès à des services de qualité en santé sexuelle et reproductive pour les adolescents et les jeunes de 10 à 24 ans, ainsi qu’à augmenter le nombre d’adolescentes et de jeunes filles ayant accès à des services de santé sexuelle et reproductive, y compris à des méthodes modernes de contraception de qualité, adaptées, inclusives et équitables.

D’aucuns espèrent que la 12e Réunion annuelle du Partenariat de Ouagadougou qui aura lieu à Abidjan du 12 au 14 décembre 2023 permettra aux acteurs clés de prioriser les défis et les opportunités liés à l’accès des jeunes aux services de santé reproductive. Afin qu’en Afrique de l’Ouest francophone, jusqu’aux derniers kilomètres, dans les villes comme dans les campagnes, tous les jeunes et adolescents puissent effectivement jouir de leurs droits.

Étiquettes
Partagez

Auteur·e

fadjimehossou

Commentaires